Propriétaire du studio
Dans cette deuxième exposition, Timothée Talard renoue avec l’attrait qu’il a pour l’entreprise, l’industrie, le consumérisme, l’objet designé.
S’inspirant des modes de production de la société de consommation, une série de dix caissons lumineux sera ainsi présentée dans l’espace d’exposition.
À la différence de leur usage habituellement publicitaire, ceux-ci sont demeurés «vierges» d’affiches ou de stickers. Ils diffusent seulement leur lumière blanche, et l’artiste, dans un geste minimal, a tagué dessus à la bombe noire une série de messages.
Ces messages, qui ont pour sujet la perte et le deuil, créent une histoire sans début ni fin, telle une spirale infinie causée par la douleur du manque.
Le texte sur ce support éclairé et séduisant, qui incite habituellement à la consommation, glisse alors dans l’intime, un voyage sur l’intériorité des sentiments.
Un triptyque de peintures y sera également présenté : Hors Cadre 50F consiste en trois dessins similaires. Un trait de peinture noire, imprécis, parcourt la bordure de chaque toile. Il fonctionne comme la délimitation d’un espace : la plus grande surface centrale de la peinture reste blanche, comme en attente.
L’espace vide de la toile devient dès lors le propos de la peinture. Le tableau se crée sur le contraste entre l’objet immaculé de production industrielle qu’est le châssis standardisé, et l’acte de peindre, de manière monochrome la tranche, zone désuète et habituellement invisible sous cadre.
L’artiste nous entraîne alors dans «l’infra-mince», aux limites de la peinture, celle qui n’est parfois même pas peinte. L’artiste a choisi de ne pas «produire», juste d’insinuer, de symboliser.
Parmi d’autres œuvres encore, poursuivant la série des « arcs-en-ciel dans la nuit » qu’il a initié en 2012, Timothée Talard évolue et applique son alchimie sur de nouvelles toiles. La série présentée, moins politique que dans les séries précédentes et, davantage liée à l’optique, jouera là encore sur le déplacement du spectateur. Lorsque celui-ci avance devant la toile, celle-ci change peu à peu de couleur pour passer d’un monochrome vert à violet, et ainsi d’un bleu à un rouge ou d’un jaune à un bleu.
Ce que Timothée Talard nous renvoie, n’est-ce pas cette propension chez chacun d’entre nous à être partagés entre des attirances liées aux dérives du consumérisme : le culte voué aux marques, les carcans sociaux, les enseignes clignotantes, les codes vestimentaires, le besoin d’accumulation…, et une critique indispensable d’un système élaboré qui nous asservit en tant que citoyen, en tant qu’humain ?
C’est la remise en cause nécessaire des obligations conditionnées. Par tous les moyens.